Seule à voix basse
Avec ma solitude j'irai par les chemins qui mènent à la Durance, troquer la résistance en langueur nostalgique, l'effriter aux galets qui roulent dans le courant. Enchanter ma peine dans le souffle du vent, les larmes perlées émues du chèvrefeuille, d'un éclat de coeur, d'un rire d'oiseau. Si longue que danse la route, à s'en faire exploser les poumons aux parfums épais d'un printemps solaire.
Seule, seule, seule, seule, avec ma solitude, au milieu de ce paradis peuplé de petits frères des cimes, sous le regard du rapace tournoyant, majestueux. Il n'est de pierre au chemin des ombres et des oiseaux. Filer grand train, décoller, s'envoler, survoler, rêver de long voyage. Aller jusqu'à l'eau vive, noyer l'ombre née des gouffres, puiser l'essence lumineuse des pensées sans mot. Pardonner. Essayer au moins. Un détail, une écorchure. Essayer au corps. Mesurer les arpents de rochers et de glace, et les printemps, et la cadence soudain joyeuse d'un coeur vivant.
Au retour libéré, siffler un air ami, inondé de joie et de couchant. Rentrer à la maison.